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La langue arménienne, Machtots et le Matenadaran
Une phrase en arménien occidental ne veut pas dire la même chose qu’en arménien oriental. Arminée nous raconte l’anecdote du touriste arménien qui vit en France et ne parle que l’arménien occidental. Il fait nuit quand il entre dans sa chambre d’hôtel mais ne ferme pas la porte qui cache alors l’entrée des toilettes. Il redescend donc à l’accueil pour demander où sont les toilettes et il emploie un mot arménien qui veut dire « usine » en arménien oriental (l’arménien oriental est parlé en Arménie alors que l’arménien occidental est parlé par les gens de la diaspora). La personne de l’accueil lui dit que c’est fermé et que cet endroit n’ouvre que le matin. L’homme s’énerve et dit qu’il a absolument besoin d’y aller, qu’il ne peut pas attendre le matin. Drôle de pays où on ne peut aller aux toilettes/usine que la nuit ! Bref, l’affaire s’arrange et l’homme remonte dans sa chambre et ferme la porte pour accéder à sa salle de bains-toilettes. D’ici quelques années, l’arménien occidental va disparaître.
En 387, l’Arménie est partagée en deux pour la deuxième fois : l’Arménie occidentale passe sous domination romaine et l’Arménie orientale demeure un royaume sous influence des des Perses Sassanides. Les rois d’Arménie gardent un statut fragile. Au début du V è siècle, le roi et le Catholicos se demandent comment garder l’identité du peuple.Il fallait traduire la Bible (la messe était dite en grec) pour que le peuple comprenne.
Le moine Mesrop Machtots est chargé de trouver une solution pour se passer du grec et du syriaque dans le domaine religieux et du persan dans le domaine administratif. Il voyage pour étudier les alphabets latin, syrien, grec. Aucun de ses alphabets ne convient, il faut donc en inventer un qui contiendra 36 lettres pour représenter 36 sons. En 405, Machtots réussit à inventer un alphabet parfait. Il a utilisé l’ordre de l’alphabet grec. Une lettre représente un son. Pas besoin d’accents, pas de diphtongues. On appelle l’arménien classique le grabar.
Au XIII è siècle, se sont ajoutées deux lettres pour les son « o » et « f »
Un Arménien n’a pas de difficultés pour comprendre une langue étrangère.
La langue arménienne est un rameau isolé des langues indo-européennes. C’est une langue agglutinante plus que flexionnelle.
Le mot se décline. On peut prendre deux mots simples pour en former un compliqué. Certains mots sont très longs. Le mot n’a pas de genre, il n’y a pas d’article, pas d’accord. Arminée trouve qu’en français l’utilisation des articles est compliquée. Elle racontait aux touristes qu’au début de l’indépendance, les gens brûlaient des pneus dans la poêle au lieu de dire dans le poêle.
L’arménien est une langue tonique. Il n’y a pas de temps immédiats (futur immédiat ou passé proche) ni de passé simple. Il n’y a aps besoin de pronoms personnels.
Cet alphabet a, de tous temps, constitué un puissant élément de cohésion entre les Arméniens face aux occupations étrangères.
À Érevan, un musée est dédié à Machtots : le Matenadaran (en arménien : « bibliothèque ») c'est-à-dire l’Institut Machtots sur les manuscrits anciens. C’est l’un des plus riches dépôts de manuscrits (18 000) et de documents (300 000 ou 30 000 ?) au monde.
Le bâtiment a été construit dans les années 1950. Devant, se trouve la statue de Mesrop Machtots et de son disciple Korian qui nous a transmis l’histoire de son maître.
À gauche, on lit la plus ancienne phrase écrite en arménien. : « Connaître la sagesse et l’instruction, comprendre les paroles de l’intelligence » (texte de Salomon).
Sur la façade, la porte en cuivre bosselé est entourée des représentants les plus illustres de la culture médiévale : de gauche à droite : Toros Roslin (miniaturiste), Grégoire de Tatev (philosophe), Anania de Shirak (astronome et mathématicien)
Moïse de Khorène (le père de l’historiographie arménienne), Mekhitar Goch (fabuliste et juriste), Frik (poète).
l'aigle d'Arménie (dynastie des Bagratides)
le hall d'entrée
beaucoup de magnifiques ouvrages rares :
une scène de classe. Le proverbe dit : « celui qui n’entend pas avec ses oreilles entendra avec son dos ». Le maître châtie le mauvais élève pendant qu’un autre se tient à côté, les bras chargés de férules.
Des évangiles :
évangile Targmantchats peint par Grégoire (1232)
évangile datant de 337, peint et écrit par Avag. Sultania (Tabriz)
évangile Sanssarian palimpeste de 986 sur un manuscrit du V è
évangile écrit par Galust, peint et relié par Stepanos
évangile peint par Hovhannès 1201
et aussi :
un manuscrit pétrifié :
autoportrait du peintre Tzerun 14 è
un tout petit livre de prières :
Grégoire de Tatev avec ses disciples :
24 Smbat le connétable (2)
un manuscrit restauré en 1994 :
Adam et Ève chassés du Paradis. Le serpent avec les ailes représente la méchanceté qui s’envole. Adam et Ève sont plus petits que Dieu.
des ouvrages scientifiques :
Anania Chirakatsi 7 è arithmétique
26 carte géographique 12è-13è
carte de Ptolémée (100-170) imprimé à Ulm en 1486
livre de médecine 14 è
livre de géométrie d'Avicenne
flore de plantes médicinales 18 è
livre sur la nature humaine 13 - 14 è
des livres de musique :
ménestrels 13 è
fragment avec des neumes 9 è 10 è
acteur masqué en haut à droite 1290
Naghach Hovnatan chansonnier 1765
autographe de Sayat-Nova 1366 poète dont nous reparlerons à propos des films de Paradjanov :
chansonnier turc écrit avec des lettres arméniennes 16 è:
manuscrit éthiopien 16 è :
chanson italienne 18 è
manuscrit russe :
Couverture de l’Évangile d’Etchmiadzin (989). Il en existe trois exemplaires : un ici, un à la BNF et un en Italie.
Calendrier d’église (4 cm, 19 g), réalisé en 1434, il faut le lire à la loupe
Grand Homéliaire de Mouch (50 cm sur 70 cm), réalisé en 1200-1202. Il a fallu 602 peaux de veau pour le réaliser et il pèse 28 kg. En 1203, le propriétaire fut tué et en 1206, les Arméniens ont racheté le manuscrit et l’ont donné au monastère de Mouch. En 1915, au moment du génocide, on a partagé le manuscrit en deux : une moitié est arrivée à Etchmiadzin. La deuxième femme est décédée en route, avant elle avait enterré le manuscrit qui a été trouvé par un officier russe. Maintenant les deux moitiés sont réunies et le manuscrit se trouve au Matedanaran.
les deux ouvrages l"un à côté de l'autre :
Le Prix de la mémoire de la Fondation Danielle Mitterand a été fondé en 1988 par Eva Weil et Jean-Claude Gawsewitch. Danielle Mitterand en était la présidente d’honneur. Il a été décerné pour la première fois le 1 décembre 1989 au Matenadaran, aoinsi qu’au 14 è Dalaï Lama et à Serge Klarsfeld.
une photo trouvée sur internet : un funambule :
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